Dimanche 25 février 2024

Transfiguration du Christ 2ème dimanche de Carême

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé » (Mc 9, 2-10)

Les textes du jour

Homélie du Père Roger HÉBERT, recteur du sanctuaire diocésain Notre-Dame-de-Laghet

Je n’aurais pas voulu être à la place de St Marc quand St Pierre lui a raconté ce qu’il avait vécu sur le Mont Thabor lors de la Transfiguration ! Oui, parce que vous savez sans doute que St Marc n’était pas un des 12 apôtres ; s’il a pu raconter ce qui s’était passé à ce moment-là, c’est parce qu’on le lui a raconté et ce n’est pas difficile de savoir qui lui a raconté : c’est Pierre ! Pourquoi on le sait avec tant de certitude ? Parce que Marc a été le secrétaire de Pierre, d’ailleurs les exégètes, ces spécialistes des Ecritures Saintes, donnent souvent à cet Evangile de Marc le nom d’Evangile de Pierre parce qu’il a été écrit à partir des souvenirs que Pierre a livré à Marc, son fidèle secrétaire.

Pourquoi je dis que je n’aurai pas aimé être à la place de St Marc quand Pierre racontait ses souvenirs de la Transfiguration ? Oh tout simplement parce que ça ne devait pas être facile de prendre des notes. D’abord, parce qu’à l’époque, écrire, c’était toute une aventure ! On écrivait moins vite sur une tablette de cire ou sur un parchemin que sur un ordinateur ! Mais surtout parce que les mots devaient se bousculer dans la bouche de Pierre et on le comprend, ce n’est quand même pas rien de décrire, d’expliquer ce qui s’est passé dans un événement où on est mis, sans préparation aucune en contact avec la divinité.

Vous allez me dire que les apôtres étaient 24h sur 24 en contact avec la divinité puisqu’ils vivaient avec Jésus ; oui, c’est vrai, mais dans la vie commune, sa divinité était voilée, ils ne voyaient que son humanité et une humanité véritable : il avait faim, il avait soif, il était fatigué, il pleurait, il riait, bref c’était un vrai homme, meilleur que les autres, bien sûr, mais réellement homme. Et voilà qu’au sommet du Mont Thabor, lieu de la Transfiguration, sa divinité est subitement dévoilée et c’est son humanité qui est cachée, quelle expérience ils ont dû vivre ! On peut donc facilement imaginer qu’il n’était pas simple d’en rendre compte, les mots devaient vraiment se bousculer au portillon de la bouche de Pierre quand il essayait de raconter tout ça à Marc. On sent bien que c’est la même chose pour St Jean qui nous rapporte, dans le livre de l’Apocalypse, ce qu’il a vu dans une grande vision. Les mots se bousculent, se corrigent, parfois c’est invraisemblable, c’est tellement stupéfiant d’être mis en contact avec le monde de Dieu !

Tout ça me fait penser aux conversations que peuvent avoir des jeunes filles quand l’une d’entre elles parle aux autres de son amoureux ; elle est tellement sous le charme que, bien souvent, les mots se bousculent au portillon de ses lèvres pour le décrire et au bout d’un moment, à bout de mots, parce qu’aucun n’est suffisamment grand pour le décrire, elle finit par dire : il est trop ! Avec tout ça, on ne sait pas s’il a les yeux bleus ou marron, les cheveux blonds ou bruns, s’il est grand ou petit, peu importe, ce ne sont que des détails, l’essentiel est dit quand elle dit : il est trop ! Oui, trop beau, trop bon, trop amoureux, trop tout ce que vous voulez, ce qui signifie qu’il est bien plus et bien mieux que ce que vous pouvez imaginer. Je crois que si Marc avait écrit son Evangile au 21ème siècle, il ne se serait pas embarrassé des détails que Pierre a essayé de lui transmettre en lui disant c’était comme ça ; mais, en fait c’était pas tout à fait comme ça, au bout d’un moment il aurait dit à Pierre, tu veux dire que Jésus était trop ? Et Pierre aurait répondu : oui, c’est exactement ça, tu as tout compris et si bien résumé : il était trop !

Et Pierre aurait sûrement immédiatement rajouté : mais tu sais, il n’y avait pas que Jésus qui était trop, le Père du ciel quand il a parlé, lui aussi, il était trop ! Si on jouait au jeu des 7 familles, la Trinité, ça serait la famille trop ! A leur manière, ils sont tous trop, le Père comme le Fils sans oublier le Saint-Esprit ! On comprend le désir que Pierre exprime de ne pas redescendre tout de suite, de s’installer dans ce moment béni. A chaque fois que nous vivons des moments de pure grâce, nous aussi, nous aimerions que ça puisse durer, que nous n’ayons pas à redescendre, à retrouver la grisaille du quotidien et la banalité de la répétition des jours, avec son lot d’épreuves et parfois l’expérience que Dieu est loin, que nous ne sentons plus sa présence. Mais Jésus ne va pas accéder à la demande, pourtant généreuse, de Pierre de pouvoir s’installer. En effet, Pierre s’oublie complètement en proposant de ne dresser que 3 tentes. Il s’oublie, il oublie ses deux compagnons, il ne pense plus qu’à Jésus, Moïse, Elie, il veut tout pour Dieu ! C’est beau, pourtant Jésus refuse ! Comment le comprendre ?

Oh c’est assez simple ! En voulant que ce moment béni ne s’arrête plus, en voulant s’installer sur le Thabor, Pierre ne se rend pas compte qu’il installerait aussi Jésus dans la gloire. Or, le moment n’est encore pas venu, pour Jésus, de s’installer dans la Gloire. Il est venu pour sauver les hommes et il devra aller au bout de la mission confiée qui exigera qu’il passe par de grandes souffrances.

Et c’est justement pour préparer le cœur de ces 3 apôtres qui constituent comme sa garde rapprochée que Jésus a voulu leur permettre de vivre cette révélation du Mont Thabor. Ils en auront bien besoin quand ils seront à Gethsémani et qu’ils le verront défiguré par la souffrance morale qui l’accablera. En invitant Pierre, Jacques et Jean à le suivre au Thabor pour le voir transfiguré, il les préparait pour qu’ils ne sombrent pas quand ils le verraient défiguré. Et il en va toujours ainsi : le Seigneur donne toujours de grandes grâces à ceux qui auront à vivre de grandes épreuves pour qu’ils puissent tenir le coup. Cette précision vient encore confirmer, s’il en était besoin, le fait que Jésus est vraiment trop !

OK, Jésus est trop et j’ai dit que la Trinité était la famille trop, mais alors comment comprendre la 1ère lecture dans laquelle Dieu demande à Abraham de sacrifier son Fils unique ? Dieu avait attendu 25 ans entre le moment où il a annoncé qu’il aurait un fils, malgré son âge et celui de sa femme, malgré la stérilité qui plombait la vie de ce couple et quand, enfin, il tient parole et qu’Isaac arrive, faisant la joie de ses parents et assurant que la promesse d’un peuple nombreux pourrait se réaliser, Dieu demande que ce fils lui soit sacrifié. Là, vraiment, Dieu ne semble plus de la famille trop ! Ou alors, c’est de la famille trop impossible à comprendre !

Je n’ai plus assez de temps pour expliquer en détail ce texte que je reconnais être difficile à comprendre. Je l’ai dit, Dieu a mis 25 ans à accomplir sa promesse, Abraham a attendu 25 ans ce fils, comment Dieu aurait-il pu lui demander de lui offrir en sacrifice ? C’est ce qu’Abraham a cru parce qu’il a ainsi interprété l’appel intérieur qu’il a reçu. Il l’a interprété en fonction des croyances de cette époque dans laquelle on pratiquait encore des sacrifices humains, pensant faire plaisir aiux divinités. Non, ce n’est pas à ce sacrifice insensé que Dieu appelait Abraham mais à un autre, bien plus essentiel, bien plus porteur de vie. Essayons de comprendre.

Quand Isaac est enfin arrivé, Abraham a eu une réaction très humaine : il a surprotégé Isaac pour qu’il ne lui arrive rien. Parce que, s’il lui était arrivé quelque chose, la promesse allait s’effondrer, Abraham ne serait jamais le père d’une multitude de peuples. Cette surprotection d’Abraham était donc le signe d’un manque de foi de sa part, il croyait que tout était entre ses mains et que, maintenant que Dieu lui avait donné ce fils, il ne s’en occuperait plus ! Du coup, Abraham devait étouffer Isaac, l’empêchant de faire ce qu’il aurait aimé faire. C’est à cette relation étouffante à son fils que Dieu demande à Abraham de renoncer. Voilà le sacrifice que Dieu lui demande. Si Dieu lui a demandé de monter sur la montagne avec un couteau ce n’était pas pour trancher la gorge de son fils, mais le lien étouffant qu’il avait installé. Voilà ce que nous enseignent les psys qui lisent ce texte en disant, à juste titre, que c’est un texte magnifique. Du coup, vous le voyez, Dieu est vraiment trop ! Il va s’occuper d’Abraham pour qu’il accepte de laisser son fils vivre sa vie. Oui, Dieu est trop !

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons que, d’une manière ou d’une autre, nous puissions, nous aussi faire cette expérience que le Seigneur est trop, trop plein d’amour pour chacune et chacun de nous. Parce que, quand nous aurons fait cette expérience, ce sont nos visages tristes qui seront transfigurés en visages de joie. Oui, Notre Dame de Laghet, obtiens-nous cette grâce pour que notre foi devienne rayonnante.


Dimanche 18 février 2024

Tentation de Jésus au désert 1er dimanche de Carême

« Jésus fut tenté par Satan, et les anges le servaient » (Mc 1, 12-15)

Les textes du jour

Angélus : pendant le Carême, combattons les bêtes sauvages de l’âme

En commentant l’Évangile de ce premier dimanche de Carême avant la prière de l’Angélus, le Pape a mis en garde contre les « bêtes sauvages de l’âme », ces passions désordonnées qui agitent notre cœur et nous déchirent. Pour les combattre, François suggère de se retirer dans le désert, comme Jésus, et de consacrer un espace au silence et à l’écoute de Dieu. Ainsi pourrons-nous les affronter, les vaincre et retrouver l’harmonie de l’âme qui infuse le goût du Ciel. Suite...


Dimanche 11 février 2024

La lèpre le quitta 6ème dimanche du Temps Ordinaire

La lèpre le quitta et il fut purifié (Mc 1, 40-45)

Les textes du jour

Homélie du Père Roger HÉBERT, recteur du sanctuaire diocésain Notre-Dame-de-Laghet

J’imagine bien volontiers que, dans l’ancien temps, quand quelqu’un découvrait une tache sur sa peau, il devait commencer à redouter le pire. En effet, souvent ces taches étaient le signe qu’on avait contracté la lèpre, cette maladie terrible qui, peu à peu, vous défigurait et surtout vous écartait de toute vie sociale, familiale, religieuse. Dans la 1° lecture, on a entendu quelques-unes des mesures qui devaient être prises, dès que la lèpre avait été constatée. De plus, à l’époque, avec cette sale habitude de tout interpréter en termes de pur et d’impur, la sanction la plus douloureuse devait sans doute être cette déclaration de la personne lépreuse comme maudite par Dieu. La lèpre extérieure devenait révélatrice d’une lèpre intérieure, le péché, qui justifiait ces mesures punitives, inhumaines, que Dieu, pensait-on, ne pouvait qu’approuver, puisqu’il détestait le péché. Il est bon d’avoir tout cela en tête pour comprendre que l’attitude de Jésus, dans l’Evangile, va opérer une véritable révolution religieuse.

Quand cet homme lépreux s’approche de lui pour lui demander sa guérison, Jésus aurait pu hurler pour alerter les forces de l’ordre afin que la loi soit respectée et que cet homme retourne dans son lieu de confinement qu’il n’aurait jamais dû quitter. Mais il n’en est rien, il entend sa demande qui est une demande de foi et c’est cette foi qui lui a donné l’audace de braver tous les interdits : Si tu le veux, tu peux me purifier, Jésus répond favorablement : Je le veux, sois purifié. C’était déjà extraordinaire que Jésus laisse cet homme lépreux l’approcher et le guérisse, mais ça ne suffisait encore pas ! Jésus va aller plus loin en osant toucher cet homme : saisi de compassion, Jésus étendit la main et le toucha. Il aurait pu se contenter d’étendre la main, c’est-à-dire d’imposer les mains à distance, ça aurait aussi bien marché ! Mais Jésus a voulu aller plus loin en touchant cet homme, geste dangereux en raison de la contagion de la lèpre et surtout geste interdit en raison de l’impureté de cet homme qui passerait automatiquement sur celui qui serait assez fou pour le toucher.

Par son geste, Jésus casse tous les codes, dévoilant ainsi clairement le sens de sa mission. Et c’est très important parce que nous sommes toujours dans le chapitre premier de l’Evangile de Marc, c’est-à-dire que nous sommes au tout début de la mission de Jésus. Eh bien, par ce geste, dès le début, Jésus montre ce que sera le sens de sa mission qui a été si bien annoncée de manière prophétique dans l’un des poèmes du Serviteur Souffrant d’Isaïe : C’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il s’est chargé. Et la suite du texte ne fait que confirmer tout cela. Vous avez entendu l’ordre que Jésus a donné à cet homme guéri : Va te montrer au prêtre, et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit dans la Loi : cela sera pour les gens un témoignage.

Il était essentiel que cet homme puisse faire constater sa guérison pour être pleinement réintégré dans la société, dans sa famille et dans sa religion. Mais, en l’invitant à accomplir cette démarche obligatoire, c’est un peu comme si Jésus demandait un service à cet homme ; on l’entend bien à travers ces mots : cela sera pour les gens un témoignage. Jésus invite cet homme à témoigner non pas en racontant ce qui lui est arrivé mais en accomplissant les prescriptions prévues dans la loi en cette circonstance. Alors, il nous faut chercher à comprendre en quoi l’accomplissement des prescriptions va être un témoignage. Pour cela, il est nécessaire de savoir ce qu’il fallait offrir pour la purification d’un lépreux ; la loi l’énonçait clairement dans le livre du Lévitique au chapitre 14 : il fallait prendre deux oiseaux vivants, pigeons, tourterelles, peu importe, sacrifier l’un et plonger l’autre dans le sang de celui qui a été immolé avant de le laisser s’envoler. J’espère que vous voyez tout de suite combien ce symbolisme devient parlant pour nous les chrétiens puisque c’est dans le sang de Jésus que nous sommes libérés de nos péchés, que nous pouvons retrouver notre liberté.

Evidemment, au moment où l’homme lépreux a offert ce sacrifice, il n’a pas pu comprendre, mais plus tard, tout a dû devenir lumineux pour lui ! Si je devais conseiller le réalisateur de l’excellente série The Chosen sur la vie de Jésus, je lui suggérerai de montrer cet homme, lépreux-guéri, au pieds de la Croix et se mettant à genoux dès que le sang coule du côté ouvert de Jésus. Oui, c’est là que tout prend sens, c’est à la lumière de la croix que le sacrifice offert par cet homme devient un témoignage puisque c’est là que nous voyons l’accomplissement total de la prophétie d’Isaïe : C’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il s’est chargé.

Mais ce n’est pas tout ! Il faut aussi écouter avec beaucoup d’attention ce qui était dit à la fin du texte d’Evangile : Une fois parti, cet homme se mit à proclamer et à répandre la nouvelle, de sorte que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville, mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. Comme souvent, Saint Marc va vite, parfois un peu trop vite ! Ce n’est sûrement pas immédiatement que cet homme s’est mis à témoigner, il a dû accomplir, auparavant, la démarche que Jésus lui avait demandée d’accomplir, car il désirait plus que tout pouvoir être réintégré. Mais dès que ça a été fait, il a témoigné et, là, il s’est passé quelque chose d’étonnant : plus il témoignait et plus Jésus se retrouvait en difficulté, l’Evangile notait que Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville, mais restait à l’écart, dans des endroits déserts. Autrement dit, il y a comme une inversion, c’est le lépreux qui annonce la Parole quand Jésus ne peut plus le faire et c’est Jésus qui subit l’exclusion que subissait auparavant cet homme. La prophétie d’Isaïe se révèle d’une profondeur inouïe : C’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il s’est chargé. Jésus prend sur lui nos souffrances, notre péché et il en accepte les conséquences, il accepte de payer le prix qu’il faut pour que nous retrouvions notre dignité, notre liberté.

Puisqu’en ce jour, nous fêtons aussi Notre Dame de Lourdes et que notre prière rejoint particulièrement malades et soignants, je me permets de donner un point de vigilance à tous ceux qui visitent ou soignent, d’une manière ou d’une autre, les personnes en souffrance, que ces souffrances soient physiques, psychologiques ou spirituelles. La compassion que nous pouvons ressentir nous ferait parfois désirer prendre sur nous une partie de leurs souffrances, c’est très beau, mais c’est aussi très dangereux car nous n’avons pas les épaules assez larges et assez solides pour le faire. Non, c’est à Jésus qu’il faut demander de porter tout ça ! Il nous faut donc inviter, aussi délicatement que possible, la personne souffrante à s’approcher de Jésus pour lui demander de porter tout ce qui est trop lourd pour elle. Et si elle ne peut ou ne veut s’approcher de Jésus, c’est à nous de confier à Jésus ce qui l’écrase. Samedi, au cours de la prière de guérison, c’est, une nouvelle fois, ce que nous proposerons de vivre à tous ceux qui viendront.

Pour conclure, j’ai envie de m’écrier : il est tellement grand, tellement beau, tellement fort ce mystère du Salut ! C’est ce que je dis à chaque messe après la consécration : il est grand le mystère de la foi ! C’est pour cela que mercredi nous entrerons dans le temps du carême. Ce temps, il n’est pas d’abord un temps de privations, d’efforts, il est fondamentalement un temps qui nous est offert pour que, année après années, nous puissions entrer un peu plus dans ce grand mystère du Salut, nous puissions goûter un peu mieux tout ce que Jésus a fait pour nous sauver, pour nous rendre notre dignité et notre liberté.

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons la grâce de pouvoir profiter de ce temps du carême pour goûter la bonté du Seigneur qui a accepté de porter sur lui nos souffrances, nos douleurs, notre péché. Qu’elle nous aide à vivre toutes les privations que nous pourrions choisir comme autant de moyens pour que nos vies soient toujours plus ajustées à l’amour de Celui qui a accepté par amour de porter tout ce qui est trop lourd pour nous, tout ce qui nous empêche de vivre.


Dimanche 4 février 2024

Guérison de la belle-mère de Pierre 5ème dimanche du Temps Ordinaire

« Il guérit beaucoup de gens atteints de toutes sortes de maladies » (Mc 1, 29-39)

Fête de Saint Blaise. Retour en images

Les textes du jour

Homélie du Père Roger HÉBERT, recteur du sanctuaire diocésain Notre-Dame-de-Laghet

J’espère qu’en venant à cette messe vous n’aviez pas le moral dans les chaussettes parce que, si c’était le cas, la 1° lecture n’a pas dû vous rebooster ! Vraiment, la vie de l’homme sur la terre est une corvée, depuis des mois je n’ai en partage que le néant, je ne compte que des nuits de souffrance. Le soir n’en finit pas : je suis envahi de cauchemars jusqu’à l’aube. C’est sûr qu’on aime mieux entendre des paroles tirées du livre d’Isaïe, ce livre dans lequel il y a tant de belles promesses, de belles paroles du genre : je t’ai appelé par ton nom, tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix pour moi car je t’aime ! (Is 43) Oui, c’est vrai, mais ce livre de Job, il est dans les Ecritures parce que, ce que dit Job, c’est aussi ce que pensent bien des personnes accablées par la souffrance et ici, au sanctuaire de Laghet, nous accueillons tellement de personnes qui pourraient reprendre mot pour mot ces paroles de Job. Alors, on comprend bien que la question se pose : à quoi bon vivre quand la vie semble se résumer à une accumulation incessante d’épreuves générant des souffrances à la limite du supportable ?

Le livre de Job est une merveille de ce point de vue, puisque Dieu ne va jamais couper la parole à Job, Dieu ne va jamais chercher à le faire taire en lui disant qu’il blasphème en tenant de tels propos à son égard. Et même mieux, vers la fin du livre, Dieu dira qu’il n’y a que Job qui a bien parlé. En disant cela Dieu disqualifie la parole des amis ou des pseudo-amis de Job qui, pendant de longs chapitres, vont chercher à justifier Dieu, à expliquer à Job pourquoi il souffre. La souffrance, elle ne s’explique pas, elle s’accueille dans un respect infini, dans le silence d’une présence, qui dit mieux que des paroles, la compassion. Très souvent, nous n’osons pas aller voir des personnes en grande souffrance et nous nous justifions de la manière suivante : je ne sais pas quoi lui dire ! Mais justement, il n’y a rien à dire, être là, c’est déjà beaucoup. En effet, comme elles font peur, tout le monde s’éloigne d’elles, ce qui fait qu’en plus de leur souffrance, ces personnes doivent aussi porter le poids de la solitude qui est peut-être encore plus lourd que tout le reste. C’est pour cela que Dieu ne fera jamais taire ceux qui, submergés par la souffrance, crieront vers Lui-même si leurs cris se transforment en accusations bien injustes.

Hier après-midi, nous avons vécu le 1° temps de ce qu’on appelle « la prière des frères » qui permet d’accueillir des personnes en souffrance et de prier pour elles. Nous avons demandé au Saint Esprit qu’il nous fasse la grâce d’être pour ces personnes les yeux du Seigneur qui voulait poser son regard d’amour sur elles, les oreilles du Seigneur qui voulait les écouter avec grande compassion, les mains du Seigneur qui voulait les combler de bénédictions, le cœur du Seigneur qui voulait soulager, restaurer ses enfants bien-aimés dans la tourmente. N’hésitez pas à faire connaître cette proposition qui aura lieu chaque 1° samedi du mois. Nous connaissons tous la merveilleuse parole de Claudel : « Jésus n’est pas venu expliquer la souffrance mais l’habiter par sa présence ». C’est bien la consolation apportée par la présence de Jésus que nous voulons offrir dans ce temps de « prière des frères », c’est cette même consolation qu’espèrent tous ceux qui souffrent et qui attendent notre visite, alors demandons la grâce de ne pas nous dérober.

C’est vrai, Jésus n’est pas venu expliquer la souffrance mais l’habiter par sa présence, l’Evangile nous l’a bien montré. Jamais Jésus ne développera de grands discours pour tenter d’expliquer l’inexplicable. Tous ceux qui chercheront à expliquer à des parents pourquoi ils ont perdu leur enfant sont sûrs de dire de grosses bêtises et de provoquer de profondes blessures. Jésus n’est pas venu expliquer la souffrance mais l’habiter par sa présence. Dans cet Evangile, comme dans tant d’autres passages, on le voit aller au contact des malades, des souffrants et ne jamais se dérober quand ils viennent à lui ou quand on les amène à lui. Dans le texte d’aujourd’hui, il y a 2 scènes différentes, la guérison de la belle-mère de Pierre et la guérison de tous ceux qui lui sont amenés au coucher du soleil. Le temps me manquera pour regarder en détail ces deux scènes, c’est pourquoi je vais m’arrêter à la 1° scène, celle de la guérison de la belle-mère de Pierre. Il pourrait y avoir une mention qui nous choque si nous la comprenons mal. Cette mention, c’est ce que fait la belle-mère quand elle est guérie, le texte nous dit : Jésus s’approcha, la saisit par la main et la fit lever. La fièvre la quitta, et elle les servait.

C’est-à-dire qu’on a l’impression que Jésus a guéri la femme de la maison parce que cette bande de bonhommes était incapable de se préparer le frichti ! Pierre les invite à la maison, mais, pas de chance, la belle-mère est malade, il n’y a rien de prêt ! Plutôt que de relever les manches et de s’abaisser à faire la cuisine, activité, à l’époque, réservée aux femmes, ils font intervenir Jésus ! Evidemment, il n’en est rien. En entrant dans la maison, Jésus a dû tout de suite voir qu’il y avait un problème. En effet, nous sommes un jour de sabbat, ce texte est la suite de celui de la semaine dernière qui nous montrait Jésus prêchant à la synagogue, un jour de sabbat, donc un samedi. Et c’est en sortant de la synagogue qu’ils vont chez Pierre. Le sabbat, chez les juifs, commençait le vendredi soir par un repas festif qui débutait par un très beau rite. La femme de la maison allumait les lumières du shabbat qui devaient brûler ensuite jusqu’au lendemain. Quand Jésus entre chez Pierre, il voit tout de suite qu’il y a un problème, la femme de la maison étant couchée, la maison est dans le noir.

Permettez-moi d’ouvrir une parenthèse : j’ai dit « la femme de la maison est couchée ». Certains utilisent souvent ce texte pour demander le mariage des prêtres, ils disent que les apôtres étaient mariés, la preuve, on parle de la belle-mère de Pierre, s’il avait une belle-mère, c’est qu’il avait une femme donc les prêtres peuvent se marier CQFD ! Mais avez-vous entendu parler de la femme de Pierre ? Jésus qui fréquentait assidument la maison de Pierre et qui était attentif à chaque personne n’aurait pas manqué de mettre en valeur la femme de Pierre si cette femme avait été dans la maison. Or, jamais on n’en parle, Pierre avait sûrement été marié, mais était-il veuf ? Nous n’en savons rien, en tout cas, on ne parle jamais de sa femme ! Donc n’utilisons pas ce texte pour échafauder de grandes théories ni dans un sens ni dans l’autre !

Revenons au texte. En entrant dans la maison qui est restée dans le noir, Jésus voit le problème et il va donc guérir la femme de la maison pour qu’elle puisse accomplir cette si belle mission confiée aux femmes : apporter la lumière dans sa maison, particulièrement le jour du sabbat. C’est grâce à la femme que la maison d’un juif se différencie de la maison d’un païen ; en effet, par cette lumière allumée au début du sabbat, la femme transforme sa maison en maison de prière. Et si Jésus guérit cette femme, c’est pour qu’elle puisse tenir sa place, accomplir sa mission dans cette maison, c’est pour que cette maison soit illuminée par la présence de Dieu. Alors, la maison redeviendra une maison de prière la distinguant des maisons des païens où l’on se contente de boire, manger, dormir. Jésus s’approcha, la saisit par la main et la fit lever. La fièvre la quitta, et elle les servait. On pourrait dire « elle accomplissait son service » et, maintenant, on voit bien tout ce qu’il peut y avoir derrière cette expression qui ne réduit pas la femme au statut de boniche des hommes mais l’élève à une dignité incomparable.

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons au Saint-Esprit de nous éclairer pour que nous puissions voir de quelle(s) fièvre(s) nous avons besoin d’être guéri pour accomplir la mission qui est la nôtre, afin que nos frères ne restent pas dans la nuit. Demandons aussi la grâce de ne jamais nous dérober devant tous ceux qui souffrent et qui attendent que, par notre présence, nous leur apportions la consolation du Seigneur. Ce sont sans doute toutes ces intentions que Jésus lui-même a porté dans cette longue prière qui était mentionnée dans l’Evangile

Feuilles de messe, prière universelle et intentions de messe

Messe saint André - l'AbadieMesse Saint André - Sainte Claire de l'Abadie
Messe Saint BlaiseMesse Saint Blaise

Prière universelle et intentions de messePrière universelle et intentions de messe

Janvier 2024

Date de dernière mise à jour : Sam 09 mars 2024